L’affaire de faux médicaments dans laquelle se trouve impliqué le député AtaoHinnouho et qui a conduit en prison, plusieurs responsables de sociétés grossistes continue de susciter des questionnements. Après plusieurs rebondissements dans ce dossier, l’élu de la 15ème circonscription électorale est détenu à la Prison civile de Cotonou sur «une plainte de la douane béninoise». La Direction générale des douanes accuse le député de fraude douanière pour importation de marchandises prohibées. Cependant, au-delà de l’opportunité ou non de ladite plainte, il importe de s’interroger sur les responsabilités de la douane dans cette affaire.
Les frontières béninoises sont-elles vraiment des passoires, comme le disent plusieurs observateurs ? En tout cas, les récents faits développés dans le dossier relatif au trafic et commerce illicite de médicaments semblent bien conforter cette position. Placé en détention depuis quelques semaines, le député Atao Hinnouho est accusé d’avoir importé frauduleusement des produits prohibés. Ce qui suppose que l’importation desdits produits incriminés s’est faite de sorte à échapper aux contrôles des services douaniers. Chose curieuse, il a fallu que l’affaire de faux médicaments éclate pour que la douane béninoise se réveille, et ce des années après. Cette défaillance des services douaniers suscite bien d’interrogation et surtout la nécessité de situer les responsabilités, sans parti pris, dans cette accusation portée contre l’élu du peuple. Dans son intervention sur Frissons radio, le ministre de la justice, Joseph Djogbénou a tenté d’apporter des clarifications qui sont loin de convaincre. « Il n’y a pas de nouvelle affaire… Vous imaginez bien que les produits sont supposés entrer sur le territoire béninois, sans que le cordon douanier n’ait pu retracer leur entrée. Evidemment, la direction des douanes a émis une plainte après avoir constaté que d’importantes sommes ont dû échapper au Trésor national. Cette procédure a été également ouverte, procédure de fragrant délit. Donc, effectivement il a été placé en garde à vue à l’hôpital et l’enquête a eu lieu, le Procureur de la République l’a placé sous mandat de dépôt et a fait enrôler cette procédure sur la base de la plainte de la Direction des douanes devant le juge des fragrants délits... Je veux donc en conclusion dire qu’il n’est pas placé sous mandat de dépôt en vertu de la procédure d’instruction bien entendu », a laissé entendre le Garde des sceaux. Mais, si pour l’autorité ministérielle, tout s’est passé conformément à la Constitution, conformément au règlement intérieur de l’Assemblée nationale, et conformément au Code de procédure pénale, tout ne s’est pourtant passé comme il le fallait. Qu’en est-il de la responsabilité de la douane béninoise ? Comment a-t-on pu échapper aux contrôles des services douaniers à plusieurs reprises et ce, des années durant, malgré les moyens modernes de gestion dont s’est dotée cette structure de contrôle ? Rappelons que les douanes béninoises exercent traditionnellement trois missions à savoir une mission fiscale, puisqu’elles perçoivent des droits et taxes. Dans le prolongement de cette mission, les douanes ont un rôle économique notamment la création d’un environnement propice à l’activité de production, mais aussi la promotion du commerce licite. Les douanes béninoises prêtent assistance à d’autres administrations par l’application de réglementations particulières pour leur compte. Mais il y est ajouté, récemment, une quatrième mission, celle de la facilitation et de la sécurisation et de la chaîne logistique internationale qui implique un contrôle rigoureux des marchandises à tous les stades, de la fabrication à la destination finale, en passant par le transport. Eu égard à tout ceci, il est loisible de constater que les services douaniers ont failli à leur mission. Des sanctions s’imposent donc au nom de l’équité et d’une justice pour tous. L’hypothèse selon laquelle, il y aurait des complicités au sein de la douane n’est point à écarter, selon plusieurs observateurs. Mais jusque-là, rien. Exactement comme dans le cas de la Direction des pharmacies (Dpmed) qu’on a blanchi. Au finish, dans cette affaire de «faux médicaments», la responsabilité d’aucune des structures étatiques concernées, n’est engagée.
Aziz BADAROU